Le fromage végétal, c’est bon pour les papilles et le karma

Rencontre avec Mary Carmen Iriarte, productrice de fromage végétal artisanal frais. Elle vient d’ouvrir sa boutique à Paris et nous a accueillis pour une dégustation.

Photo : Sylvie Sabathier
Mary Carmen Iriarte dans sa boutique Jay&Joy (crédit photo: Sylvie Sabathier)

« Allons-y ! C’est bon pour la santé, l’environnement, et le karma ! » nous rassure Mary Carmen Iriarte, qui vient d’ouvrir à Paris la première boutique-laboratoire de fromage artisanal végétal frais.

« Je suis devenue végétarienne il y a quelques années et la question du fromage s’est posée quand j’ai appris qu’il était fabriqué avec de la présure [coagulant extrait de l’estomac de veaux]. J’adore le fromage et je voulais pouvoir continuer à en manger tout en respectant mes principes. Je devais faire quelque chose ! »

LA FRANCE, L’AUTRE PAYS DU « VROMAGE »

En cherchant des alternatives, Mary Carmen découvre qu’aux États-Unis un fabricant comme Kite Hill Cheese a réussi à élaborer un « camembert ». La France, berceau de la gastronomie et pays du fromage, ne peut pas ignorer cette tendance, estime cette jeune Vénézuélienne. Avec l’aide son mari et d’un associé, elle commence alors à créer des vromages (« v » pour végétal et végane) à partir d’amandes et de noix de cajou biologiques – elle n’a pas le droit d’utiliser le terme « fromage », cette appellation étant réservée depuis 2013 aux produits à base de lait animal.

Fromage, une appellation réservée aux produits laitiers
L’appellation « fromage » est réglementée depuis le début des années 1950, selon le Centre national interprofessionnel de l’économie laitière.

Le décret n° 2013-1010 du 12 novembre 2013 définit l’usage du terme « fromage » et le mode de fabrication de cet aliment, impliquant que le fromage est produit à partir de lait animal liquide et que sa conception comprend une étape d’égouttage.

Avec ce décret, le fromage est un « produit fermenté ou non, affiné ou non, obtenu à partir des matières d’origine exclusivement laitière suivantes : lait, lait partiellement ou totalement écrémé, crème, matière grasse, babeurre, utilisées seules ou en mélange et coagulées en tout ou partie avant égouttage ou après élimination partielle de la partie aqueuse ».

Ce décret a remplacé le décret du 27 avril 2007 relatif aux fromages et spécialités fromagères.

À quoi ressemblent les six vromages de Mary Carmen, commercialisés sous la marque Jay & Joy ? Ils n’ont pas d’odeur et leur consistance ressemble un peu à celle du houmous. Nous les avons trouvés très bons. Dégustation avec les yeux :

Photo : Sylvie Sabathier
Le jeta frais est un fromage nature de base, en forme de mozzarella, principalement composé de lait d’amande, mais aussi d’huile de coco désodorisée, d’arrow-root, de sel rose de l’Himalaya, de carraghénane (liant à base d’algues) et d’acide lactique. Son gout est léger et frais, et le jeta se prête volontiers aux salades ou aux pizzas. (crédit photo: Sylvie Sabathier).
Photo : Sylvie Sabathier
Le jack fondu : même base que le jeta frais, avec en plus de la tomate, de la moutarde, de l’ognon et de l‘ail. Parfait pour les plats au four (crédit photo: Sylvie Sabathier)
Photo : Sylvie Sabathier
Le joy prairie : ce fromage frais est le plus plébiscité des productions de Mary Carmen. Joy Prairie est réalisé à base de noix de cajou, de citron pressé, d’eau, d’ail, de vinaigre de cidre, de sel rose de l’Himalaya, de poivre noir, d’origan, de thym et de basilic. (crédit photo: Sylvie Sabathier)
Photo : Sylvie Sabathier
Le jeta aux herbes : de petits cubes de jeta frais au gout relevé, marinés dans une préparation d’huile de tournesol, de thym, d’origan, de basilic, de baies roses et d’ail. Idéal pour les salades. (crédit photo : Sylvie Sabathier)
Photo : Sylvie Sabathier
Le jack pimenté : une base jeta frais, avec une touche de piment d’Espelette. Bien pour les gratins ou les hamburgers. (crédit photo: Jay&Joy)
Photo : Jay & Joy
Le joy volcan : toujours à partir d’une base jeta frais, l’origan et le thym viennent se mêler au poivre du Sichuan. (crédit photo: Jay&Joy)

Mary Carmen aimerait créer de nouvelles sortes de fromages, avec une fermentation plus longue, et peut-être un affinage. « Mais pour tout cela, il faut du temps et il n’y a pas beaucoup de bras ! Mon mari et mon associé s’occupent de l’administratif et du commercial, mais pas à plein temps », souligne-t-elle. « Pour l’instant, c’est moi qui fait les livraisons, à vélo ! » Chaque semaine, elle apporte une cinquantaine voire une centaine de ses fromages à quelques restaurants et magasins spécialisés, comme Loving Hut et surtout Un monde vegan (Paris 3e), le seul supermarché 100% végétal de France.

BIENTÔT CHEZ LES FROMAGERS TRADITIONNELS ?

Elle reçoit beaucoup de demandes pour expédier ses fromages en province, mais pour l’instant, ce n’est pas possible car elle refuse d’emballer sous vide : « J’ai fait le choix de l’ultra-frais. Je ne veux pas tomber dans le côté fade, sans vie ».

Jay & Joy n’est pas encore distribué par des fromagers traditionnels mais Mary Carmen espère que ce n’est qu’une question de temps. « Le message essentiel que l’on porte, c’est le partage. En France, quand les gens veulent passer un bon moment ensemble, ils s’installent autour d’un plateau de fromage. On a tous envie de s’asseoir à table avec nos proches et de manger sans qu’il y ait de barrière entre les différents modes d’alimentation ».

 

Auteur : Émilie Dehu
Auteur : Émilie Dehu

 

L'avis de la diététicienne-nutritionniste Émeline Bacot
« La valeur nutritionnelle des « fromages » végétaux dépend des ingrédients à partir desquels ils sont faits. On retrouve trois types de fromages végétaux. En tout cas, je les classe comme ça :

Les fromages végétaux industriels (faux cheddar, fausse mozzarella, etc) : ils sont généralement à éviter. Ils contiennent, pour la plupart, des huiles végétales de mauvaise qualité (palme) et des amidons (amidon de pomme de terre le plus souvent) qui sont très mauvais pour notre glycémie.

Les fromages végétaux industriels à tartiner à base de soja (comme le Sojami, par exemple) : ils sont intéressants car ils sont riches en protéines, mais le soja ne convient pas à tout le monde et il y a encore pas mal de controverse autour du soja. Donc, dans le doute, on n’en abuse pas et on évite d’en donner aux enfants.

Les fromages végétaux frais faits maison : ils sont faits à base d’oléagineux, généralement de noix de cajou, de citron pour que ça coagule, et de sel, d’herbes aromatiques et d’épices. Que des ingrédients naturels normalement. On retrouve donc les valeurs nutritionnelles de l’oléagineux utilisé (dont les vitamines et des protéines) mais sous une forme de fromage. »

La nouvelle boutique-laboratoire Jay & Joy tenue par Mary Carmen Iriarte se situe 5 rue Paul Bert (Paris 11e). Les événements et dégustations sont annoncés sur la page Facebook.

Pour suivre les publications de mon journal préféré, je reçois la lettre minimale, chaque 1er jeudi du mois. Bonne nouvelle, c’est gratuit et sans engagement !

Partager cet article

À propos de l'auteur
Journaliste multimédia, avec une prédilection pour le journalisme de solution.
Articles similaires
Du même auteur
Écrire un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

5 réponses

  1. Amateur de fromage, je me suis d’abord dit « Oups !!! Sacrilège !!! Qu’est-ce que c’est que ce truc ???!!! » Mais, l’article d’Emilie a suscité ma curiosité et me donne envie de goûter.
    Sachant que le vromage pourrait alors trouver place sur mon plateau de … fromage. 🙂

  2. Super article qui donne envie de goûter ces fameux vromages.
    Belle démarche, on espère qu’elle gagnera la province qui l’attend avec impatience !

  3. C’est intéressant et ça donne envie, mais je ne comprends pas très bien… Pourquoi n’indiquez-vous pas l’adresse de cette magicienne ? Vous dites qu’elle vient d’ouvrir une boutique à Paris. Mais où exactement ? Vous citez aussi deux magasins où on peut trouver ses vromages, mais sans préciser où ils se trouvent. Si vous ne voulez pas alourdir votre article avec des adresses, vous pourriez peut-être les regrouper en marge ou en fin d’article ?
    Pardon ! Je viens de relire l’article, et il y a effectivement une adresse (écrite en caractères minuscules, après l’affiche et l’avis de la diététicienne) que je n’avais pas vue…
    Présenter le produit, nous faire rêver, c’est bien, et vous le faites parfaitement.
    L’ancrer dans la réalité (indiquer où on peut le trouver), c’est bien utile aussi. Je trouve que c’est une information importante qu’il convient de mettre en valeur (en gras dans le texte, ou dans un encadré bien visible au milieu de l’article, par exemple).
    Merci d’avance d’y penser pour un prochain article-découverte !

    1. Marie, merci pour cette suggestion, il est vrai que traditionnellement dans la presse on met les adresses à la fin d’un article 😉 Ceci dit, nous mettons dans l’article le lien vers les deux endroits où vous pouvez trouver ces vromages : le restaurant Loving hut et le supermarché Un monde vegan sont des liens cliquables, qui vous emmènent sur leurs sites web avec toutes les infos pour les trouver 🙂

Rechercher