Climat : les étudiants français en pincent pour Greta Thunberg

De passage à Paris pour faire la grève du climat, la militante suédoise Greta Thunberg a boosté la mobilisation étudiante. Les jeunes français veulent cependant éviter toute forme de récupération.

Greve pour le climat
Greta Thunberg (à gauche en doudoune violette) lors de la 2e grève scolaire française pour le climat le vendredi 22 février 2019 à Paris. Photo: Laura Remoué.

Sa pancarte blanche avec écrit en majuscules noires « SKOLSTREJK FÖR KLIMATET » (« Grève scolaire pour le climat » en suédois) ne l’a pas quittée depuis sa première action, il y a quelques mois. La jeune militante Greta Thunberg manifestait à Paris vendredi 22 février dernier en compagnie des leaders belges et allemandes. Ensemble, ces adolescentes parcourent l’Europe, mobilisant chaque fois plus de monde.

Cette escale à Paris n’y fait pas exception : ils étaient 5 000 à 8 000 dans les rues lors de cette deuxième grève française, pour un millier la semaine précédente. Greta Thunberg s’avoue épatée par l’engouement autour de son action : « Quand j’ai commencé, je n’aurais jamais imaginé que cela deviendrait si énorme. C’est une surprise à chaque fois que je vois quelqu’un se battre ! » déclare-t-elle lors d’une prise de parole au milieu des manifestants, place de la République.

MOBILISATION EUROPÉENNE

La joie exprimée par les jeunes français face à la venue de Greta Thunberg et des autres vedettes européennes interpelle, alors qu’en France aucune figure n’émerge pour l’instant, la mobilisation étant plutôt menée par des associations et collectifs étudiants. « D’ailleurs, je me demande si ça n’est pas mieux comme ça » estime Cassandre, étudiante à Paris Panthéon-Assas.

Ce vendredi, c’est donc la suédoise Greta Thunberg qui donne de la visibilité au mouvement. Du haut de ses 16 ans, la jeune fille suscite la sympathie, c’est un personnage « fédérateur » d’après Hippolyte, étudiant en master Action publique. Dans le cortège, Maïa se réjouit aussi de sa présence. Cela « fait plus de bruit et montre que l’on est unis avec les autres pays européens ». Cette mobilisation continentale est d’ailleurs primordiale pour Juliette, 20 ans : « c’est à ce niveau-là qu’il faut agir, c’est là qu’il y a des leviers politiques ».

RISQUE DE RÉCUPÉRATION ?

La semaine dernière, lors de la première grève, devant les portes du ministère de l’écologie, la secrétaire d’État Brune Poirson avait souhaité s’entretenir avec une délégation étudiante. La foule avait décliné l’invitation, par refus de désigner des représentants. Cette situation a, depuis, été clarifiée en Assemblée générale : le mouvement souhaite la discussion et élira des délégués, mais qui ne devront en aucun cas faire de compromis sur les revendications votées en AG. Chaque négociation devra repasser par le vote.

Vendredi dernier, tandis que Greta Thunberg et les leaders belges et allemandes se rendaient à l’Élysée en fin de journée, je suis allée à la Bourse du Travail, où les associations discutaient de l’évolution de la grève. Lorsque les organisateurs évoquèrent cette rencontre avec Emmanuel Macron au micro, mon voisin murmura ce que beaucoup de participants semblaient penser : « Chauuuud ». La moindre possibilité de récupération inquiète et même Greta Thunberg ne fait pas exception à la règle (1).

Greve pour le climat
Paris, vendredi 22 février 2019. Photo: Laura Remoué.

D’après la sociologue et politologue Camille Hamidi, maitre de conférence à l’Université Lyon II, l’absence de leader n’est pas une spécificité française pour autant. « Elle est récurrente dans l’histoire, on la trouvait aussi dans les années 1970 ». Il s’agissait déjà d’une volonté exprimée lors des mouvements Occupy Wall Street et des Indignés, en Espagne, rappelle-t-elle.

Alors, les Français ont-ils vraiment besoin d’un leader ? L’absence d’incarnation n’est-elle pas plutôt un problème de médias, pour qui il est plus difficile de s’adapter au collectif ? Vendredi, l’arrivée de Greta se remarque davantage par la soudaine agitation d’appareils photo brandis en l’air (bataille dans laquelle je me suis moi-même lancée) que par les cris des manifestants. Pour Hippolyte, le mouvement n’a plus besoin de leader, maintenant qu’il « a pris », car il trouve sa raison d’être dans le collectif. C’est tout le sens selon lui du slogan entonné dans les rues aujourd’hui : « Ne nous regardez pas, rejoignez-nous ! »

(1) Lire la tribune de l’écologiste Isabelle Attard : Le capitalisme vert utilise Greta Thunberg + la réponse de Greta Thunberg : La jeune militante Greta Thunberg répond à ses détracteurs.
• Pour aller plus loin, voir la vidéo du collectif de youtubeurs On est prêts, qui réclame que les médias se focalisent moins sur Greta Thunberg et plus sur l’écologie.

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À propos de l'auteur
Jeune journaliste, passionnée par les problématiques écologiques et féministes, photographe à mes heures perdues.
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