Épisode 14 : Peut-être qu’un jour je deviendrai végane

Pierre Roubin jure qu’il n’est pas près de s’arrêter : passé au bio, entré dans une AMAP, il essaye de tendre vers le zéro déchet… et se demande si naturellement il ne va pas un jour devenir végane.

Devenir vegane, pierre roubin, Mes 43 objets
Photo : Pierre Roubin.

lettrine, très vite, ma femme, mes enfants et moi avons été séduits par l’attitude zéro déchet. Je crois que c’est à la suite de la diffusion d’une rapide vignette dans un journal télévisé. La journaliste avait fait l’expérience de réduire ses poubelles au maximum jusqu’à ne plus avoir de détritus. Là encore nous nous sommes lancés dans l’aventure, comme toujours à tâtons, en prenant appui sur le livre d’une Américaine. Nous avons essayé de le transcrire dans nos habitudes à nous, dans notre culture, et dans ce qui est tout simplement possible ici et maintenant.

Nous habitons en ville dans un appartement au 1er étage sans jardin ni balcon. Devant chez nous, il y a le toit d’un atelier. Je me suis dit que je pourrais parfaitement y installer un petit jardin potager. Avec quelques palettes repérée dans les rues, je me suis construit un petit bac pour le potager. Pas si petit que ça puisqu’il fait quand même 2,50 m de long pour 1 m de large. Dans ce rectangle de nature arraché à la vie citadine, nous avons commencé à organiser un compost pour recycler tous les déchets végétaux. Avec une poignée de vers de terre trouvés sur Le Bon Coin, nous avons pu entamer un recyclage complet de toutes les épluchures de légumes. À la fin, le compost obtenu vient alimenter le jardin potager.

MANGER BIO, UNE MODE ?

Pour le reste, nous avons renforcé nos habitudes de tri très sélectif avec les papiers, les cartons et les différentes sortes de plastique en fonction de leurs capacité à être recyclés. Nous trions aussi le verre, les piles, les ampoules, les bouchons en liège, les bouchons en plastique, le petit matériel électroménager, et enfin les déchets électroniques de type écran de téléphone, et vieux matériels dont nous ne nous servons plus.

Autre démarche entamée aussi il y a deux ans, le choix d’une nourriture plus saine. Nous avons commencé à manger bio. Alors là, on pourra bien parler de « mode » (voir l’épisode précédent), mais quand la mode devient une habitude, qu’elle s’installe et devient une règle, voire une éthique de vie, c’est qu’elle est devenue le quotidien. Et qu’elle n’est plus un passe-temps pour nous divertir.

Nous sommes donc entrés dans une AMAP. C’est une expérience vraiment intéressante qui permet de partager des choses avec une famille d’agriculteurs, d’aller les voir, de les aider parfois pour certaines tâches ingrates. Nous comprenons mieux d’où viennent nos légumes et d’où viennent nos fruits, nous les relions à un vrai circuit physique, nous les englobons dans les efforts qu’ils ont requis, nous les rattachons à de vraies personnes dont le travail est de nous les fournir, nous retrouvons du sens là où il s’était perdu.

LE PLAISIR DU VRAC

Dans la foulée nous nous sommes aussi mis à acheter en vrac, là encore pour réduire les emballages et réduire les déchets. Chez Day By Day nous achetons des céréales, des pâtes, du riz, mais aussi des produits ménagers comme du savon noir, du bicarbonate de soude, du liquide vaisselle ou même des pastilles de lave-vaisselle. Tout peut s’acheter en vrac : l’huile d’olive, la pâte à tartiner, le miel, le café, le thé et les tisanes, le sel et le poivre. C’est une autre manière de consommer.

Maintenant nous allons faire nos courses tout à fait différemment : nous arrivons avec nos bocaux. Il faut d’abord prendre le temps de les tarer, d’inscrire leur poids sur le culot de la bouteille. Ensuite nous les remplissons ; le poids du contenant est déduit du poids final à la pesée. C’est une autre attitude, nous y allons tranquillement, en prenant notre temps, nous demandons des conseils, nous écoutons les avis des autres, leurs petits trucs, leurs astuces. C’est un vrai moment de plaisir.

MARRE DES REPROCHES

Toutes ces nouvelles attitudes de vie, ces tentatives pour aller vers quelque chose qui nous semble meilleur, finalement nous les avons adoptées, avec des nuances, nous les avons faites nôtres. Donc oui, certains diront « encore une nouvelle mode », mais si elle suit la trajectoire des précédentes, et si finalement l’expérience est positive, alors elle vient s’inscrire naturellement dans notre quotidien.

D’accord, il faut lutter contre notre envie compulsive de changement et de divertissement car c’est une suite sans fin, qui justement contredit tout ce pourquoi nous faisons des efforts, mais si l’aboutissement de tout ça est une attitude naturellement plus vertueuse dans ce cas il ne faut pas se reprocher d’avoir cédé à une mode.

Ce que je veux dire par-là, c’est que dans ce pari qui consiste à vivre avec 43 objets, je m’attache à considérer toutes les externalités. Il est donc assez naturel de monter d’un niveau en quelque sorte, de méta-observer la démarche, de décentrer son point de vue, et donc de considérer les externalités mêmes du cheminement. Bon, tout cela est un petit peu abstrait, mais moi je me comprends, et surtout je ne me berce pas d’illusions, je crois aborder tout cela avec modestie et une propension à me remettre en question.

JE FAIS ASSEZ PEU DE CAS DU REGARD DES AUTRES

Peut-être qu’après ça, et quand il me sera devenu naturel de vivre avec 43 objets, peut-être qu’après je deviendrai végane. Après tout aujourd’hui je n’en sais rien. Ce qui est certain c’est que je ne suis pas vraiment parti pour m’arrêter, je fais assez peu de cas du regard des autres.

Finalement, est-ce que dénoncer les bobos, les parisiens, les intellos, les lecteurs de Télérama, les téléspectateurs d’Arte, des auditeurs de France Culture, et les gauchistes, ce n’est pas finalement encore une autre mode, tout aussi vaine et fugitive que les autres ? Bon ok, j’avoue, je suis un peu tout cela à la fois, mais au moins je le sais, et je ne me fais aucune illusion à ce sujet. À bon entendeur !

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À propos de l'auteur
Ma démarche minimaliste est très matérialiste (au sens de pragmatique), urbaine, et en même temps réflexive. Je suis philosophe de formation donc j’aime bien manipuler aussi les idées.
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Une réponse

  1. on peut trés bien être végan , écolo ( ce qui dans mon esprit ne va pas l’un sans l’autre , quoi que je connaisse beaucoup de végés qui ne le soient pas ) aller de plus en plus vers le zéro déchets , et regarder Arté ( qui est pour moi la seule chaîne de télé qui apporte au cerveau de l’intelligence plutôt que de la pomper ) !!!…;)

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