Violence à Nuit debout : « On vaut mieux que ça! »

Triste spectacle dimanche soir pour une fête du travail ensoleillée… J’avoue que mes yeux piquaient et pas seulement à cause des gaz lacrymogènes. La stupidité est tout aussi lacrymogène, croyez-moi.

Après un mois passé à militer place de la République, je suis las de voir rejouer les sempiternelles mascarades granguignolesques. « Not in my Name ».

Nous devons nous désolidariser clairement avec les gens qui débarquent en fin de soirée, masqués, pour se frotter à la police. Nous serons d’autant plus légitimes pour dénoncer la violence extrême que nous fait subir cet État policier.

Les romantiques qui fantasment encore sur les barricades d’antan verront dans les pacifistes des “révolutionnaires de salon”. Fort heureusement, le théâtre politique s’est déplacé depuis le 19e siècle, et comme le disait Antonio Gramsci, nous vivons une « guerre de position » plus qu’une guerre de mouvement. Mais dans cet affrontement culturel, nous sommes les dindons de la farce. Le débat nous est confisqué par le théâtre médiatique de la violence spectaculaire : forces de l’ordre omniprésentes, provocations répétées et défilés de groupes masqués qui débarquent à minuit pour en découdre. BFM TV n’est pas près de diffuser l’Assemblée générale de Nuit debout dans ce contexte.

« Qui ose croire que les CRS plieront sous 3 pavés lancés ? »

Oui, nous subissons des violences constantes depuis le début du mouvement : un manifestant rennais a perdu un œil cette semaine. Au lycée Bergson. Et partout… Et Rémi Fraisse. Et Carlo Giuliani… Mais, à cette violence notoire, notre réponse ne doit être que désobéissance pacifiste, désobéissance musicale, insurrection des consciences. Ne cessons jamais de parler à l’intelligence des gens ! Qui d’entre nous peut encore croire que GO Sport sera affecté par une vitrine brisée ? Qui ose croire que les CRS plieront sous trois pavés lancés ? Votre violence est vaine, notre insurrection est dangereuse.

Les gens de Nuit debout, et moi le premier, ont été trop complaisants avec certains agissements violents. J’avoue savourer mon plaisir lorsque les panneaux JCDecaux sont fracassés, mais l’arrière-goût amer qui vient juste après est un sentiment d’être manipulé. Pris entre deux feux : entre ceux qui viennent pour « casser du flic » : banlieusards ou petits bourgeois(es) qui, autrefois, se faisaient les dents aux Parc des Princes, et de l’autre, un gouvernement qui n’attend plus que le « dérapage de trop » pour discréditer un mouvement qu’il n’aurait pas imaginé dans ses pires cauchemars. Face à ce manifeste mépris de classe, ne nous laissons pas déborder par nos sentiments.

Nuit debout vaut mieux que ça !

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À propos de l'auteur
Journaliste à l’Alter JT, comédien, vidéaste, touche-à-tout… Je m’intéresse particulièrement aux sujets écologiques et sociaux et à l’art contemporain.
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9 réponses

    1. Evidemment, il y a deux poids/deux mesures dans le traitement médiatique ! Le mépris de classe pointe du doigt les dégâts du peuple mais ne s’indigne pas de la barbarie des « puissants ». Le propos n’est pas moral mais plus, stratégique. Soyons plus intelligent et ne répondons pas à la violence par la violence mais par une insurrection pacifiste populaire qui me semble beaucoup plus dangereuse pour le gouvernement !

  1. C’est triste et inadmissible de voir du materiel urbain cassé et des fauteurs de troubles qui veulent en découdre avec les forces de l’ordre.
    Moi, je dis haut et fort « not is my name ».
    Nuit debout est un mouvement pacifiste et le restera. Il faudrait nous mobiliser aussi pour dénoncer les violences faites envers la police. Nous sommes la paix !

  2. Siné est mort. Lui qui éructait « Mourir ? Jamais ! Plutôt crever ! » a fini par être lassé « par la Camarde qui le poursuivait d’un zèle imbécile ».
    Donc, il ne reste plus qu’à porter un toast à cet irréductible anarchiste qui a connu et entretenu des relations avec tous ceux qui ont compté d’intéressant dans le Jazz, la peinture, la littérature, le cinéma, la radio, la presse et autres moyens d’expression depuis 70 ans, et surtout au bien qu’il nous a fait.

    Gardons tout de même à l’esprit la magnifique époque que nous vivons dont les prédécesseurs d’Armand Robin, Brassens et Siné nous avaient anticipé le portrait :

    « Derrière les deux crapules [le Prêtre et le Soldat] en vient une troisième, la plus vile, la plus lâche et la plus sotte : le Marchand. (…) Il détaille [la mort] dans sa boutique qui est l’antre du mensonge et de la ruse basse (…). Quant aux promesses d’avenir qu’il étrangle derrière son comptoir, (…) quant à l’épouvantable misère qu’il entretient mathématiquement, quant aux milliers de cadavres qu’entassent continuellement son avidité et son avarice, il vaut mieux n’en pas parler. Il suffit de dire que l’état commercial ou industriel est sans doute le pire fléau que le monde ait connu. Et c’est le développement de cet état qu’on veut bien nous promettre pour l’avenir.  »
    Georges Darien in La Belle France pp 1263-64 (1901)

    « Que l’imbécilité des riches, qui digère, et l’imbécilité des pauvres, qui bâille, cessent d’exister. »
    Georges Darien in La Belle France

    1. Bonjour Hishaida, bel hommage que celui-là, dans la lignée de tous ceux que j’ai entendus ce matin lors de la crémation de Siné (mon ancien patron) au Père Lachaise.

  3. Merci pour cet écrit. Pour avoir vécu de plein fouet mai 68 à 17 ans, je comprend du fond du cœur ce que tu peux ressentir : ce gout amer des illusions perdues….Non, pas perdues, seulement un peu plus difficiles à suivre !
    Continue, pas de peur…
    Se délivrer des a priori.
    Sur ce texte :
    Non, nous ne sommes pas les dindons de la farce puisque nous sommes lucides.
    Oui, restons pacifistes , humanistes, tolérants. La tolérance, cet héroïsme au quotidien !
    Belle vie !
    M-F

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