Atelier jardinage à La maison verte, en banlieue parisienne, où notre chroniqueuse June Caravel s’essaye à la permaculture.
Voilà sept mois que mon compagnon et moi vivons dans notre maison autonome. Jusque-là, j’étais trop occupée par les travaux pour pouvoir me consacrer au jardin, mais le printemps est là et c’est le moment de planter. Je suis d’autant plus pressée que j’attends un enfant pour fin avril et qu’il y a beaucoup de travail.
Lors de l’installation des cuves de récupération d’eau (voir l’épisode 2), je savais que la terre serait entièrement retournée et que l’herbe ne pousserait plus. Or, une terre à nu, c’est tout ce qu’il faut éviter en permaculture. Ce jardin va donc être un gros défi pour moi, d’autant que je n’ai pour ainsi dire jamais vraiment jardiné (à part avec un ami permaculteur et un autre ami jardinier bio quelques mois avant d’acquérir la maison). J’ai même réussi à tuer toutes les plantes en pot qu’on m’offrait jusqu’ici, à l’exception d’une plante dépurative que m’a donnée mon cousin il y a deux ans et que j’ai maintenue en vie jusque dans cette maison. C’est elle d’ailleurs qui me donne l’espoir d’y arriver.
Pour ne pas être déçue, je me répète que c’est une expérimentation : si ça marche tant mieux, si rien ne pousse tant pis, j’utiliserai une autre méthode l’année suivante. Mais je suis plutôt confiante.
EXIT LA MONOCULTURE
Il y a quelques semaines, je me suis plongée dans le catalogue de l’association Kokopelli, qui œuvre à la diffusion de semences libres de droits et reproductibles. J’ai sélectionné un peu de tout : légumes, fruits, plantes aromatiques, mais aussi fleurs. Car si j’ai bien retenu une leçon des sessions de jardinage en permaculture avec mon ami jardinier Eric Berqa, c’est qu’il faut absolument favoriser la biodiversité. Plus il y a d’espèces végétales au sol, plus il y a d’insectes et d’animaux qui favorisent la pollinisation et la migration des semences, ce qui produit un écosystème riche. Exit donc la monoculture.
Voici à quoi ressemble le jardin actuellement : il a une allée centrale pour pouvoir circuler de la maison à la dépendance, 5 arbres de chaque côté, et des buttes formées par la terre retirée pour enfouir partiellement de part et d’autre du chemin central les 2 cuves de récupération d’eau de pluie (on n’a pas pu les enterrer totalement car en creusant il y avait de la marne – ou argile gorgée d’eau).
Le jardinage en butte n’est pas systématique en permaculture loin de là, mais mon terrain s’y prête désormais naturellement. De plus, cela fait moins mal au dos, ce qui n’est pas négligeable étant donné que je suis enceinte et que je dois le moins porter possible.
« QUELQU’UN AURAIT UNE BROYEUSE ? »
Je dois maintenant préparer la terre. Et il y a du travail ! Les anciens propriétaires de la maison enfouissaient leurs déchets pour ne pas avoir à aller à la déchetterie. Je retrouve donc dans la terre argileuse des bouts de tuiles, de la matière plastique blanche expansée, des clous rouillés, des bouts de ciment et tout un tas de cailloux. Il y en a partout et ce sera un travail de titan de réussir à tout enlever. D’autant plus que m’agenouiller pour ramasser me coûte particulièrement avec mon gros ventre en ce moment. Mais je décide d’y passer un peu de temps tous les jours.
J’ai également hérité d’un gros tas de bois, que je compte utiliser pour recouvrir la terre et ainsi ne pas laisser mon sol nu. Seul hic : je n’ai plus de budget pour m’acheter une broyeuse car les travaux ont coûté plus cher que prévu. J’ai posté à tout hasard une annonce sur Smiile, le site d’entraide entre voisins, en demandant si quelqu’un aurait une broyeuse à me prêter. Et cela a marché ! J’ai fait la connaissance de Pascale, une voisine tout aussi zéro déchet que moi, ultra sympathique, qui vit à 500 mètres et qui m’a même aidé à rouler le broyeur jusqu’à chez moi.
Seulement ce que j’ai découvert c’est que je ne pouvais broyer que des branches de maximum 3 cm de diamètre avec. J’ai donc acheté la tronçonneuse électrique la moins chère que j’ai trouvée sauf que j’ai dû la rendre car elle n’avait pas assez de puissance. Du coup, j’ai dépiauté mon tas de bois au sécateur et à la main pour pouvoir les broyer. Mais lorsque j’ai commencé à recouvrir de broyat les allées du jardin je me suis rendue compte que j’allais avoir besoin de beaucoup plus de BRF (bois raméal fragmenté) que cela.
RENDEZ-VOUS AU JARDIN
Entre temps, j’ai invité un groupe informel de blogueuses zéro déchet et d’amis à venir jardiner. En une heure et demie, nous avons réussi à déplacer la moitié du tas de bois, à remplir 2 sacs de feuilles mortes et 2 sacs de branchage, à remplir un bon sac de pierres et à monter une butte. Puis je leur ai expliqué quelques principes de permaculture : avec quoi recouvrir la terre pour qu’elle ne soit jamais à nu (paille, tonte d’herbe, déchets végétaux de cuisine, broyat, carton…). Pourquoi la terre ne doit-elle jamais être à nu ? Afin d’éviter la sécheresse du sol, de donner à manger aux vers qui vont transformer cette matière en humus et aussi pour éviter la pousse de « mauvaises herbes ».
Nous nous sommes promis de nous retrouver régulièrement, pour ceux qui veulent apprendre la permaculture ou juste jardiner. En espérant que les prochaines fois, il fera beau…
3 réponses
Bonjour June,
vous cumulez les difficultés là, donc vraiment ne vous inquiétez pas si rien ne pousse cette année, ou si c’est très maigre… L’équilibre d’un jardin en permaculture ça ne se fait pas en un jour : déjà, on parle 18 mois minimum pour une bonne terre… et c’est la terre qui est à la base de tout. La couverture permanente et régulièrement enrichie va créer de l’humus, vous pouvez tout à fait vous contenter de la continuer même là où vous ne pouvez rien cultiver cette année, les vers de terre vont remonter l’argile et fabriquer le précieux complexe argilo-humique qui est la base de la fertilité.
D’autre part, je pense que vous le savez, on considère souvent que la première année sur un terrain est idéalement une année d’observation : comment tourne la lumière, les endroits humides, les endroits secs, les effets de bordure, les plantes locales (qui donnent des indices sur la nature de la terre). C’est vrai qu’on a souvent envie de voir de résultats rapidement mais si l’endroit n’était pas déjà un potager, franchement c’est rare. Donc pas d’inquiétude, surtout pas 🙂
Attention aux buttes, elles conviennent surtout aux endroits humides, sinon c’est trop drainé et une simple lasagne suffit.
Vous avez mon blog et mon contact, n’hésitez pas à m’écrire, il y a quelques années, les difficultés du début j’ai eu ma part. Mais le temps de la nature est un temps long et il faut donc se tranquilliser : à terme elle vous rendra toujours le bien que vous lui avez fait.
Bonjour Isabelle et merci pour ton commentaire, c’est drôle j’assistais justement à une conférence d’un permaculteur à Sotteville-lès-Rouen qui disait lui aussi que la première année est une année d’observation. Tu as tout à fait raison et je ne compte pas forcément atteindre l’autonomie alimentaire cette année. Pour moi c’est avant tout une expérience. a marche tant mieux, ça ne marche pas, tant pis. Mais le jardin heureusement donne déjà quelque chose… Je viens de récolter de la ciboulette hier soir (reste des anciens propriétaires ?) et des noix et des figues en septembre dernier. Mieux que rien :).
Bon le journal minimal est tellement bien minimal 🙂 qu’il n’envoie pas de mail en cas de réponse à un commentaire, heureusement que je suis passée voir – mais ton terrain est un problème intéressant, c’est vraiment une terre qui a souffert. Je suis d’ailleurs persuadée que la perma peut la réparer avec un peu de patience.
Par exemple dans le registre « observation » : cette pollution visible c’est quand même plutôt ennuyeux, car qu’en est-il de la pollution invisible ? La voisine à la broyeuse connaît-elle un peu les soucis du coin en matière de pollution industrielle ? Et ces précédents propriétaires tellement insoucieux, ils auraient pas fait d’autres bêtises en balançant des produits dans le jardin ? Il faudrait quand même essayer d’en savoir un peu plus, il me semble, quitte à devoir cultiver quelques légumes dans de grands pots ou bacs avec de la terre importée la première année. Histoire de se faire plaisir en attendant, surtout si un petit doit manger la production du jardin à terme.
Il existe tout un tas de plantes dépolluantes, la luzerne serait une des plus rapides par exemple, qui a aussi la propriété de préparer le sol pour les cultures suivantes en fixant l’azote de l’air (y laisser les racines au fauchage, par contre les premiers feuillages chargés en pollution ne pourront pas être compostés)… Bref, avant de penser autonomie alimentaire, qui est de toutes façons un objectif difficilement atteignable – on peut juste faire de grosses économies (huile, beurre, laitages, tout ça on fait pas dans un potager ^^), il faudrait à mon humble avis penser d’abord « soin et réparation de la terre »… Il n’y a pas une association dans ton coin ? Des bonnes volontés parmi tes contacts ? Tu n’aurais pas trop de quelques regards avisés et d’un peu d’aide, à ce point. Et le temps, toujours le temps, on fait tout avec lui en perma, même si c’est parfois dur d’accepter de ralentir, au coeur de cette civilisation frénétique 🙂