Pour en finir avec les toiles de paillage, ces faux-amis des jardiniers qui nuisent à la santé du sol

Censées faciliter l’entretien des potagers et des parterres de fleurs, les bâches et autres toiles de paillage causent de nombreux problèmes. Rien ne vaut le paillage naturel. Les conseils du jardinier Pierre Nachin.

toiles de paillage
Qu’elles soient en textile bio ou en plastique, les toiles de paillage créent de multiples problèmes.

Lettrine, Contrairement à la fable que nous vendent de nombreuses jardineries ou sociétés d’entretien d’espaces verts, les toiles de paillage ne sont pas la solution miracle contre les mauvaises herbes… Mais alors pas du tout ! Les herbes et les adventices pousseront toujours, quoi que l’on mette au sol. Pire encore, la bâche rend difficile l’arrachage et le binage des « mauvaises herbes ».

Sans compter que les graines de pissenlit, de frêne, d’érable, de chardon, de séneçon et autres s’y déposeront toujours car les toiles de paillage, qu’elles soient en plastique, en jute/chanvre dit « bio » ou en géotextile sont la majorité du temps recouvertes de déchets végétaux comme la paille, le broyat de branches, le mulch, l’écorce de fèves de cacao, etc. Dans le pire des cas elles sont même recouvertes de paillage minéral (une aberration !).

BÂCHER TUE LE SOL

En outre, cette gangue textile posée aux pieds des végétaux s’avère être une cloison artificielle qui bloque les processus vertueux de la nature. L’amendement humique (c’est-à-dire l’engrais produit par l’humus) ne peut pas se faire si on pose une toile de paillage. Lire (ou relire) à ce sujet l’article d’Iris Petitjean : Pailler le sol pour se passer de pesticides oui, mais pas avec des bâches en plastique !

C’est d’autant plus absurde que l’une des vertus du paillage est l’apport de matière dans le sol, indispensable au végétaux, car le soleil et la pluie ne suffisent pas au processus de la photosynthèse. Il est donc positif de pailler, mais sans bâche par pitié, pour permettre aux cycles du carbone et de l’azote de se dérouler normalement, et pour permettre à la vie du sol (vers, acariens, champignons, collemboles…) de s’épanouir.

PAILLEZ SUR UNE BONNE ÉPAISSEUR

Bien nourries, les plantes donneront ainsi tout leur potentiel de floraison et de beaux légumes charnus dans les potagers. Elles seront également moins carencées et plus résistantes aux maladies. Alors, imitons la forêt et son cycle vertueux ! Voici quelques conseils pour un entretien facile :

  1. Paillez avec du déchet végétal de récupération. Ne l’achetez pas, ce serait dommage alors qu’il y en a partout à recycler (broyat de branche du paysagiste, compost « maison », feuilles mortes, écorce en scierie…). Si vous habitez en métropole, boycottez les cosses de cacao, de noix de coco et autres qui traversent l’océan pour venir pailler nos massifs « bio », c’est révoltant car onéreux, coûteux en bilan carbone et conditionné dans des sacs en plastique. Évitez aussi les déchets de résineux tel que des taillures de thuya ou de cyprès, c’est très efficace mais cela tue la vie du sol.
  2. Ne posez JAMAIS de toile. Qu’elles soient de plastiques ou dites « bio », elles ne respectent pas le sol, sont néfastes pour vos plantes, et compliquent l’entretien du massif.
  3. Paillez sur une bonne épaisseur. N’hésitez pas à en mettre 20 cm, car cela se tasse vite. Les « mauvaises herbes » et leurs racines se retirent très bien dans ce support bien meuble.
  4. Toute les trois à quatre semaines (c’est la fréquence des désherbages chimiques au glyphosate/RoundUp), passez le râteau pour remuer votre paillage. Les plantules toute juste sorties de leurs graines sont très fragiles. Elles mourront sans même tirer dessus.
  5. Comme la vie de votre sol est désormais prospère grâce au paillage, celui-ci se transforme rapidement en humus. Vous devrez alors tous les ans ou tous les deux ans « refaire les niveaux ».

Peut-être qu’un jour les jardiniers amateurs et les paysagistes cesseront enfin de copier les talus d’autoroutes et reviendront à la raison ? Inspirons-nous de la Nature plutôt que de l’A7 !

Pour suivre les publications de mon journal préféré, je reçois la lettre minimale, chaque 1er jeudi du mois. Bonne nouvelle, c’est gratuit et sans engagement !

Partager cet article

À propos de l'auteur
Pépiniériste et paysagiste de formation, je travaille comme « intermittent des jardins ». Je suis également conseiller municipal dans mon petit village franc-comtois.
Articles similaires
Du même auteur
Écrire un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

2 réponses

  1. Bonjour, je vous écris d’une petite bourgade de Bourgogne et en tant que voisin je serai curieux de savoir comment vous gérez les terrains de votre commune.

  2. Bonjour Hubert et merci pour votre question voisin,

    Concrètement ici, et grâce à l’article de Iris Petitjean (diffusé auprès des élus de la commission Fleurissement), nous avons décidé de ne plus utiliser de bâches/toiles de paillage. Nous allons aussi utiliser du paillis de BRF pour nos massifs et plantations. Ce Bois Raméale Fragmenté est récupéré gracieusement auprès de nos deux élagueurs du village. Deux ou trois bennes (env. 20 m3) de BRF de belle qualité devraient suffire à nos besoins annuels. Les avantages de pailler nos massifs sont nombreux: C’est esthétique; ça enrichit le sol; ça rend le désherbage à la main plus facile et, ça empêche le dessèchement de la terre.

    Concernant la préservation de l’eau, et à cause des restrictions estivales qui se suivent, nous privilégions désormais la plantation de vivaces plutôt que d’annuelles dans nos massifs. Les vivaces sont plus résistantes à la sècheresse, et sont moins couteuses pour la mairie!
    (au passage, Merci à Sylvette de la Com’Fleur pour cette brillante idée!)
    Nous cherchons une citerne d’eau de grande capacité ….de récup, et gratuite si possible! Pour récupérer l’eau de pluie, et, qui servirait à quelques besoins de la commune.

Rechercher