Comment s’extraire du vacarme quotidien, ralentir et remettre les compteurs à zéro ? Ressortez la check list de vos bagages, prenez une gomme et effacez…
À la veille des vacances, les valises sont souvent pleines. Pleines de choses qui peuvent vous gâcher votre séjour et que j’ai classées ci-dessous en quatre grandes catégories : les remplaçables, les contournables, les dispensables et les inessentiels. Autant d’objets dont vous n’avez absolument pas besoin si vous voulez voyager léger.
LES REMPLAÇABLES :
1. Les smartphones, ordinateurs et autres tablettes. Pas de vraies vacances sans digital detox. Prévenez votre patron(ne) : cet été, vous exercerez pleinement votre droit à la déconnexion ! Les anxieux pourront toujours se contenter de couper les données cellulaires de leur smartphone. Mais cela revient à arrêter de fumer en gardant un paquet entamé caché sous le canapé. On vous conseille donc de placer votre puce téléphonique dans un engin vintage. Vous savez, ceux qui dorment dans le tiroir de la commode depuis trois ans et avec lesquels on écrit les textos frénétiquement lettre par lettre ? Ça vous permet toujours de passer un coup de fil. Mais, pensez quand même à supprimer les jeux de casse-briques et de poker, véritable méthadone de la désintox digitale.
2. La télévision. La première chose à faire après avoir poussé la porte du gîte/chambre d’hôtel/bungalow, est de débrancher la télé, la recouvrir d’un linge, cacher le câble ainsi que les piles de la télécommande.
Pour ceux qui craindraient de ne pas supporter le choc, soyez rassurés : le spectacle vivant existe encore et vous pourrez toujours profiter d’un concert, d’une pièce de théâtre, ou aller au cinéma. Pour les autres qui n’aiment pas ou ne peuvent pas sortir le soir, il y a toujours ces merveilleux objets que sont… les livres !
3. Le réveil matin [nous déconseillons la lecture de ce paragraphe aux jeunes parents, dont la progéniture fait office de réveil naturel, NDR]. La grasse matinée, symbole des vacances ! Ainsi, libéré des contraintes professionnelles et éloigné des écrans, vous aurez tout le loisir de retrouver votre biorythme et d’aller vous coucher dès que les yeux vous piquent, sans attendre d’être épuisés !
4. La voiture ou la moto. Où que vous soyez, prenez pour principe de ne plus conduire. Rien ne vous interdit de partager un véhicule ou de prendre un taxi. Mais interdisez-vous de toucher un volant ! Une belle occasion de rompre avec le mode de vie sédentaire qui vous est imposé toute l’année et de redécouvrir les joies du train, de la marche, du vélo, de l’auto-stop ou même de la voile ! Moins d’autonomie, certes, mais plus de rencontres et d’échanges. Sur ce point, vous trouverez quelques conseils dans nos 14 bons plans pour s’organiser des vacances vertes.
LES CONTOURNABLES :
5. La montre. Perdre la notion du temps, voici le véritable luxe. Un comble : il est gratuit. Selon Erik Pigani, auteur de L’Art Zen du Temps (Ed. Presses du Châtelet) elle « nous lie trop au temps du travail » et « sert généralement, non à lire l’heure, mais à calculer le temps qu’il nous reste ». Toutefois, si vous devez impérativement connaître l’heure, il est toujours possible de… la demander. N’est-ce pas la meilleure manière de briser la glace ?
6. Le café. En vacances, nul besoin de se stimuler pour être performant. Dites donc au revoir à la caféine… sans toutefois lui dire adieu, car elle protégerait des AVC et du cancer colorectal. Commencez par supprimer le café de 16 heures, puis celui de 10 heures. Pour le plus difficile, celui du petit-déjeuner, optez pour un jus d’oranges ou de citrons pressés. Enfin, à midi, servez-vous un thé. Si vous aimez plus que tout le goût du café, essayez certains succédanés de graines torréfiées comme la chicorée ou l’orge. Par contre, ne tentez pas de contourner l’obstacle en avalant un déca : la plupart des procédés de décaféination industriels font appel à des solvants, aux effets méconnus. Il existe cependant une méthode de décaféination à l’eau, que de rares torréfacteurs utilisent.
7. Le miroir. Et si on arrêtait de se chercher des points noirs, de se maquiller, se raser, se coiffer bien proprement, de se contempler ? Et si on s’oubliait un peu ? Pour l’anthropologue et dramaturge Jean Duvignaud, le miroir est le « lieu du moi ». Dans une tribune écrite en 1994 pour la revue Internationale de l’Imaginaire, il s’interroge sur l’esprit des « peuples qui ne connaissent pas le miroir » et dont le visage « n’existe que pour les autres ». Sans miroir, plus de mise en scène de son visage. On ne se donne pas à voir. On oublie son « moi », cet « idiotisme occidental ». On oublie cette tierce personne qui, selon la pensée feng shui, nous épie et vient gâcher nos rêves.
LES DISPENSABLES :
8. Le maillot de bain. Oui, ceci est bien un appel au naturisme, car tant qu’à être minimaliste, autant l’être jusqu’au nu !
On sous-estime beaucoup les bienfaits de la nudité sur l’esprit et le corps. D’abord, se montrer nu oblige à assumer son corps, donne confiance en soi et accroît la sincérité des rapports humains. C’est ce que les Allemands nomment la frei körper kultur (la culture du corps libre), apparue en réaction à la pudibonderie bourgeoise des années 1900. Ensuite, le nudisme réduit les risques de coups de soleil. L’historien Arnaud Baubérot montre, dans son Histoire du naturisme (ed. PUR) que le naturisme est à l’origine une thérapie, permettant aux peaux fragiles de s’habituer au soleil en y étant exposant le matin et le soir, lorsque ses rayons sont faibles… et non entre 11 heures et 16 heures, où ils sont plus violents, et où les « porteurs de textiles » vont généralement rôtir à la plage.
9. Les couverts. Quoi, on ne va quand même pas manger avec les doigts ? Mais non ! Que diriez-vous d’adopter une paire de baguettes chinoises pour unique ustensile de cuisine ? Les tomates ? On les croque. La viande, quelle viande ? Manger à l’aide des baguettes, quand on en a pas l’habitude, est en plus un excellent moyen de garder la forme et la ligne, principal avantage : on mange moins vite. Difficile, en effet, de s’empiffrer à coup de baguettes : elles ne permettent de porter qu’une petite quantité de nourriture à la bouche. Ainsi, en prenant le temps de bien mâcher, on atteint donc la sensation de satiété avec moins de nourriture !
10. Le savon. Et si vous profitiez des vacances, loin du bureau et du métro, pour ne plus vous laver qu’à l’eau claire (et tiède de préférence) ? Oubliez ce savon qui, selon les dermatologues, décape la peau et détériore le « film hydrolipidique » qui la protège, la rendant moins résistante aux agressions.
Une pratique non seulement écologique – rappelons que les savons polluent l’eau – mais aussi économique et, bien sûr, bénéfique pour la peau. Suivez les conseils de la britannique Nicky Taylor, réalisatrice du documentaire How Dirty Can I Get ? diffusé sur la BBC ou d’une journaliste de Métronews, qui a tenté l’expérience durant deux mois. Le programme de cette dernière : « je me douche simplement à l’eau, y compris les cheveux (deux fois par semaine), mais je continue à me laver les mains après être passée aux toilettes. Je mets toujours du déodorant, je me lave toujours les dents avec du dentifrice deux fois par jour. […] Et, une fois par semaine, je frotte mon corps avec un gant de gommage pour éliminer les cellules mortes sur ma peau ». Résultat ? « Côté odeur, aucune différence. En fin de journée ou quand j’ai fait un peu de sport, j’ai même l’impression que c’est mieux. J’ai aussi la peau moins sèche, cela est notamment visible au niveau des coudes ». Pour les cheveux, qui mettent du temps à s’adapter, elle opte pour « un faux shampoing maison à base de fécule ou de bicarbonate ».
De son côté, Nicky Taylor, plus extrême, a laissé tomber tout produit d’hygiène. Pour elle ni brossage de dents, ni gant de gommage, ni shampoing maison. Conséquence : ses enfants lui refusèrent des câlins, elle annula sa présence à un mariage et dû rapidement s’offrir un détartrage des dents. Conclusion : abandonner le savon ne dispense pas de nettoyer le sébum – un corps gras naturel fait des cellules épidermiques mortes au fil de la journée – à l’aide d’un gant de crin ou d’un « pain dermatologique ».
LES INESSENTIELS :
11. La parole. Et si les vacances étaient l’occasion de vous offrir une cure de silence, préconisée par la nonne bouddhiste zen et alsacienne Kankyo Tannier ? Le bon côté de cette cure est qu’elle est accessible à tous et totalement gratuite. Il suffit de cesser de parler. Inutile de vous cloîtrer dans un monastère ou au fond d’une forêt. Inutile, également, d’être docteur en psychologie pour comprendre que le silence nous recentre sur nous-même et améliore l’écoute.
12. La nourriture. D’abord, ne plus parler. Ensuite, ne plus manger.
Le jeûne est une pratique salutaire – si elle est bien menée – qui peut commencer par une expérience de trente-six heures. Elle offre un repos digestif et permet de « désacidifier » l’intestin, en stoppant l’activité des enzymes. Tout commence avec un ultime souper, vers 18 heures. Inutile de faire des réserves : cela ne ferait qu’allonger la période de digestion de ce dernier repas. Le matin, au réveil, buvez une tisane en guise de petit-déjeuner. Cette tisane sera votre meilleur ami pendant le jeûne. Buvez-en sans modération (au moins un litre et demi dans la journée), car, même si l’eau ne remplace pas l’aliment, elle aide au drainage. Sautez ensuite le déjeuner en vous occupant à une promenade. Le soir, vous aurez déjà atteint près de trente heures de jeûne. Mangez si vous n’en pouvez plus. Mais si vous tenez jusqu’au petit-déjeuner du lendemain, attention à assurer une reprise d’alimentation douce et de grande qualité nutritionnelle : un potage, des crudités et du pain au levain. Inquièt(e) ? On vous conseille l’excellente enquête du journaliste Thierry de Lestrade, lauréat du prix Albert Londres, intitulée « Le jeûne, une nouvelle thérapie ? ». Il y répond à une question que les lecteurs du journal minimal connaissent bien : « Moins peut-il être plus ? ».
Certes, celui qui accomplira ces 12 travaux du minimaliste risque de se sentir transporté 40 000 années avant notre ère, à la grande époque de nos ancêtres les Cro-Magnon. Évidemment, vous n’êtes pas obligés de suivre toutes ces suggestions et encore moins de les appliquer simultanément !
Toutefois, et pour ma part, je ne pourrais vous faire de telles recommandations sans me les appliquer à moi-même. Mon éthique journalistique l’exige. Vous retrouverez donc, dès la rentrée, le récit de mes aventures à l’extrême frontière du minimalisme : j’ai vécu six jours ultra-minimalistes, tout nu, sans communiquer, me laver ni manger.
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2 réponses
Pour les tisanes accompagnant le jeûne, il y a celles de SCOP-TI – FRALIB, vous savez la coopérative qui a bataillé 1336 jours contre Unilever pour éviter la fermeture de leur usine et la reprendre (ex-Thé-Eléphant) … Ils tiennent toujours bon, vendent par internet, et ont besoin de soutien… Un bon exemple de relocalisation et d’entreprise à taille humaine et qui se passent de gros messieurs à cigare…
Bonjour ! C’est une excellente référence, en effet ! Merci du conseil !