Pas besoin d’aller passer quinze jours à Galaswinda pour être dépaysé, il suffit d’un weekend à Dunkerque (Nord), sur la Côte d’Opale. Visite guidée d’une ville sous-estimée d’un point de vue touristique.
Le territoire
• Dunkerque, sous-préfecture du Nord.
• Population : 86 865 Dunkerquois(es) (source Insee, 2018).
• Particularité : la ville se situe à moins de 300 km de 5 capitales européennes : Paris, Bruxelles, Londres, Amsterdam et Luxembourg.
La carte
• Altitude : 4 mètres.
• Alentours : derrière l’horizon de paddles, de bateaux de pêche, de porte-conteneurs et de ferries Dunkerque/Douvres, il y a l’Angleterre. Vers l’intérieur des terres, ce sont les corons, la « terre des mineurs de fond » célébrée par Pierre Bachelet et au Nord, « sur le chemin des dunes, la plage de Malo Bray-Dunes » chantée par Alain Souchon. Un tout petit peu plus loin, la Belgique avec ses stations balnéaires : La Panne, Nieuport, Ostende… Au Sud enfin, au-delà du port – le 3e de France pour le trafic –, s’étale la zone Seveso. Juste au-dessus de cet ensemble, le ciel mélange souvent les teintes de bleus, de gris, de blancs, de pourpres et d’orangés, et parfois vire à l’ébène.
Première impression en arrivant
À la descente du train, l’intérêt de Dunkerque ne saute pas aux yeux : la gare SNCF, non loin de la gare routière, donne sur une esplanade nue et battue par les vents. On repense aux ont-dit sur cette ville, qui « ne vaudrait pas le détour »… Mais de gaufre en bière, de balade sur le front de mer en divagations le long des canaux (creusés dès le 16e siècle), on tombe peu à peu sous le charme du port-station balnéaire et de ses habitants à la coolitude exceptionnelle.
L’ambiance
Il y en a eu, des affrontements, à Dunkerque, de la Bataille des dunes en 1658 à l’opération Dynamo en 1940, en passant par l’épopée des corsaires. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le centre ville a été détruit à près de 90 % et le port a été anéanti. Depuis, urbanistes et architectes réinventent la cité, influencés par le mouvement moderne : fonctionnalisme, rationalisme et originalité. Sans compter les nombreuses initiatives de reconquête des espaces industriels et portuaires laissés en friche.
Le carnaval de Dunkerque a lieu de mi-janvier à mi-avril. Là, le tambour-major, la clique (groupe de musiciens) et les carnavaleux – Dunkerquois(es) et autres – défilent déguisés, maquillés ou masqués en bandes dans les rues, font étape dans les « chapelles » pour boire et manger, dansent jusqu’au bout de la nuit dans des bals, au profit d’associations. Clou de la fête ? Depuis le balcon de l’hôtel de ville, le maire et le conseil municipal lancent à la foule 450 kg de harengs fumés. Ceux-ci sont ensuite mangés en souvenir des marins qui, dès le 17e siècle, allaient « à Islande » pêcher la morue durant six mois. Avant ce voyage, souvent sans retour, les armateurs leur distribuaient la moitié de leur solde et leur offraient un festin mémorable.
Le style
À Malo-les-Bains, surnommée « la reine des plages du Nord », et à Dunkerque, on trouve de nombreuses constructions de la fin du 19e au début du 20e siècle.
Les styles se mélangent : néo-flamand, anglo-normand, Art nouveau, Art déco. Les matériaux aussi : brique, pierre, bois, verre, fonte…
On voit ainsi des chalets suisses, des palais corinthiens, des pagodes chinoises, des villas orientales, des folies signées Eugène Viollet-le-Duc, Charles Garnier, Eugène Colibert, François Reynaert…
Brève rencontre
Drôle de créatures, en marchant sur les quais…
La statue
Celle de Jean Bart (1650-1702), l’enfant du pays devenu, à 22 ans, corsaire au service de Louis IV, roi de France. En 1694, au large de l’île de Texel, il reprend aux Hollandais un convoi de 120 navires chargés de blé norvégien faisant route vers Dunkerque. Jean Bart sauve la France de la famine. Le roi l’anoblit et le fait entrer dans la légende.
Créée par David d’Angers et inaugurée le 7 septembre 1845 sur la place Jean Bart, sa statue le montre sabre au clair, en train de se lancer à l’abordage et de haranguer ses marins… la joue trouée d’un impact de balle datant de juin 1940.
Trois activités
> MANGER
Autant prévenir : on ne va pas à Dunkerque pour faire régime. Mais pour découvrir les innombrables gourmandises du cru. Salées bien sûr, mais aussi sucrées et là, accrochez-vous : le Merveilleux de Fred (Frédéric Vaucamps), une meringue, de la crème fouettée, des éclats de chocolat, d’amandes ou de noisettes ; le couque suisse, une brioche aux raisins et à la crème pâtissière enroulée en spirale ; le doigt de Jean Bart, un gâteau aux amandes, crème au beurre café, enrobé de chocolat et, à l’Épiphanie, la galette beurrée, une brioche bombée, garnie de crème pâtissière et fouettée, aromatisée au rhum ambré, un faux air de tarte tropézienne.
> ROULER
Il suffit d’enfourcher une bicyclette pour découvrir Dunkerque et ses 25 km de plages. Avec une halte au Musée portuaire et sur les deux navires classés monuments historiques : Duchesse Anne, un fameux trois-mâts de 1901, ancien navire-école allemand, magnifiquement restauré par des bénévoles, et Sandettié témoin des bateaux-feux ou phares qui, ancrés près des bancs de sable, facilitaient la navigation.
À quelques encablures, le musée d’art contemporain (LAAC, Lieu d’art et action contemporaine) abrite une collection d’art des années 1950 à 1980 avec des œuvres de Karel Appel, César, Pierre Soulages, Peter Klasen, Andy Warhol, etc.
> NAGER
Les doux-dingues de l’association Opale Longecôte ne manquent pas une occasion de se baigner dans la mer du Nord, à 17 °C et beaucoup moins, dans un courant parfois fort, des bourrasques de vent, de pluie ou de grêle… sans aucune appréhension.
Trois fois par semaine, « les longeurs » enfilent une combinaison, des chaussons et marchent dans l’eau jusqu’à la poitrine, à un rythme lent, soutenu ou rapide. Un exercice en douceur pour les articulations et en profondeur pour le cœur, parfois même avec quelques phoques comme compagnons de virée.
Arrêt sur images
À ne pas rater
Le beffroi de Saint-Éloi est une tour carrée de briques blondes érigée en 1450, également clocher séparé de l’église paroissiale. Un ascenseur hisse les visiteurs au 5e étage, au niveau du carillon de 50 cloches dont la plus grosse, le bourdon Jean Bart, pèse 5 tonnes.
Puis, il suffit de gravir les 68 marches d’un escalier en colimaçon pour dominer, à 58 mètres de haut, la ville, le port et la plage et, par beau temps, la côte belge et les monts des Flandres. Époustouflant !
Les beffrois de Saint-Éloi et de l’Hôtel de ville de Dunkerque sont inscrits au Patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco.
La devise
Sur les armoiries de la ville, deux compliments honorifiques s’entrelacent, « Dunkerque a bien mérité de la Patrie » (attribué par le Comité de salut public après le siège de 1793) et « Ville héroïque, sert d’exemple à toute la Nation » (attribué en 1917, pendant la Première Guerre mondiale).
La légende
Au 7e siècle, Dunkerque, qui n’était encore qu’un tout petit village, aurait été protégée des invasions barbares grâce aux fortifications érigées par le géant Allowyn, un Viking converti au catholicisme après que le bon Saint Eloi (celui qui informa Dagobert qu’il avait sa culotte à l’envers) lui aurait sauvé la vie.
Y aller – Se déplacer
Dunkerque est accessible en deux heures par TGV direct depuis Paris. Sur place, pas besoin de voiture : la ville propose Dk’Bus, un service gratuit de bus réguliers circulant 7/7j, de 5h30 à 22h30. Les 5 lignes Chrono transportent, elles, en dix minutes dans toute l’agglomération, du lundi au samedi, de 7h à 19h.
Autre option : le vélo. Les voies cyclables sont très nombreuses en ville et sur le littoral.
Mais rien ne vaut une découverte de Dunkerque nez au vent pour en prendre plein les yeux et les oreilles côté éclectisme, grand air et jovialité.
Carnet de voyage
• Dunkerque Tourisme & Congrès
03 28 66 79 21
• Le Merveilleux, un boutique-hôtel de 20 chambres avec vue imprenable sur la digue et la mer du Nord à Malo-les-Bains.
03 28 69 99 68
• La Grande Marée blottie au creux des dunes de Zuydcoote, mitonne les produits locaux de saison dans de savoureux accords mets et vins naturels, et propose des goûters maison.
03 28 28 30 11
• Princess Elizabeth, un bateau à vapeur d’origine anglaise datant de 1926, a été transformé en restaurant.
07 82 63 99 09
• Le Musée portuaire situé dans un entrepôt du 19e siècle.
03 28 63 33 39
• L’association Opale Longecôte pour partager le plaisir de marcher, courir, virevolter en milieu marin. Le tout pour un prix défiant toute concurrence : 10 € la séance (équipement fourni) ou 50 € à l’année, le prix de l’adhésion à l’association.
07 78 14 47 57