Dans ma chronique précédente, des citoyens du monde entier achetaient une ile de l’Arctique. Cette fois, direction l’Antarctique, pour obtenir le passeport mondial délivré par les artistes Lucy et Jorge Orta.
Tandis qu’au pôle Nord, l’explorateur Emmanuel Hussenet continue de mobiliser les citoyens autour de l’ile Hans, prenons la tangente pour retrouver Lucy et Jorge Orta, deux artistes plasticiens qui délivrent un passeport de citoyen de l’Antarctique. S’agit-il d’une énième entourloupe fiscale pour tennisman solvable ? Non. Le pôle Sud est une terre vierge, sans autochtones, qui est un bien commun de l’humanité. Depuis 1959 et le Traité sur l’Antarctique ratifié par 12 pays, le continent austral est soustrait à toute revendication territoriale, une décision confirmée en 1991 par le protocole de Madrid qui a rassemblé 32 pays autour de la préservation du « continent blanc ».
RICHE EN HYDROCARBURES, L’ANTARCTIQUE EST MENACÉ PAR DES PRÉDATEURS
« Notre projet “Antarctica World Passport” est né en 1995 à la Biennale de Venise, puis d’un ensemble d’expériences issues d’un voyage en Antarctique en 2007, » raconte Lucy Orta. Lorsqu’il obtient son passeport tamponné, le nouveau citoyen austral se voit doté d’une responsabilité politique sur cette terre dont les ressources pétrolières sont lorgnées par de nombreux prédateurs.
Le couple binational formé par Lucy et Jorge Orta pourrait symboliser, à lui seul, cette chronique cosmopolitique. Née au Royaume-Uni, Lucy est actuellement titulaire de la chaire Art et Environnement de l’University of Arts de Londres. Jorge, lui, est argentin. Enseignant, il est membre du Conseil national argentin pour la Recherche scientifique. Ils ont installé le Studio Orta dans un moulin francilien, du côté de Marne-la-Vallée.
Ce projet politique est également artistique. « C’est une sculpture sociale, une esthétique en fonctionnement, » explique Lucy. « Nous combinons les moyens poétiques et pratiques aux enjeux de notre monde connecté et en mutation. » Dans le sillage de l’esthétique relationnelle de Nicolas Bourriaud (1), les Orta replacent l’art au cœur des transformations et des questions internationales. En proposant un passeport symbolique, Lucy et Jorge Orta nous reconnectent à notre terre : et si nous leur rendions ce cadeau en demandant notre passeport de citoyenneté antarctique ?
(1) L’esthétique relationnelle est une théorie esthétique consistant à juger les œuvres d’art en fonction des relations interhumaines qu’elles figurent, produisent ou suscitent. Elle a été définie par Nicolas Bourriaud en 1995 et est représentée par des artistes tels que Rirkrit Tiravanija ou Philippe Parreno.
- Comment obtenir un passeport universel Antarctique?
- Trois possibilités s’offrent à vous:
1. Attendre la prochaine installation, par Lucy et Jorge Orta, d’un bureau de délivrance du Passeport Universel Antarctique (comme lors de la Cop21 à Paris). Après lecture et acceptation de vos obligations en tant que citoyen du monde, le document vous sera délivré en échange d’1 €.2. Vous rendre sur le site du projet et, de là, demander un passeport virtuel. Vous pouvez télécharger une version à imprimer.
3. Vous rendre sur le site de l’University of the Art London et, après inscription, commander le passeport (cout : 4 livres sterling, soit environ 5 €).
2 réponses
Très intéressant! En attente de voir l’évolution et la suite de cette affaire.
Je suis vraiment intéressé d’obtenir un passeport universel pour réaliser mes rêves