Mon compagnon et moi avons entrepris un long voyage, sine die. Retour sur la confection des cartons avant notre départ. Objectif : se séparer d’un maximum d’objets.
Le grand saut vers l’inconnu et l’itinérance a commencé entre 4 murs, au fond des placards où j’ai livré une bataille contre quelques années d’accumulation. L’objectif : ne garder que l’essentiel.
Ce ne fut pas une mince affaire car je suis une cumularde. Une vraie. Pas de celles et ceux qui achètent de manière frénétique, certes. Disons que j’appartiens plutôt au clan des amateurs de seconde main, des bricolos tendance upcycling (transformation de matériaux ou d’objets qui ne servent plus en nouveaux objets), bref de tous ceux qui se rassurent à l’idée d’être ainsi dans une consommation raisonnable.
Au fil des années, la règle du one in, one out (un dedans, un dehors) établie chez nous, où tout nouvel achat implique de se séparer d’un autre objet de même taille, a permis d’éviter les débordements. Sans compter que 7 déménagements en dix ans auront été l’occasion de faire le tri, en gardant soigneusement ce qui est « utilisable » et/ou « transformable ».
ENVAHIE PAR LE DÉSESPOIR EN OUVRANT MES PLACARDS
Quand il a fallu plier bagages, je me suis attelée à vider notre appartement. Pas de TV, quelques meubles, de l’électro-ménager : le plus encombrant a été rapidement donné ou vendu. La confection des cartons, elle, s’est avérée plus ardue.
Imaginez la scène : lorsque j’ai ouvert mes placards et observé leur contenu, j’ai été envahie par un sentiment de désespoir. Comment tout ceci s’est retrouvé là ? Comment ce tailleur qui ne me va plus depuis des années a-t-il pu échapper au don ? Et cette pile de chaussettes à rapiécer ! Et ces livres que je ne lirai plus jamais, et ces autres, là, que je n’ai jamais lus !
En faisant mes cartons, j’en suis arrivée à la conclusion que 3 facteurs expliquaient chez moi cette tendance à l’accumulation.
- Le manque de temps pour trier à fond. Qui n’a jamais étiqueté un carton ou dossier virtuel avec la mention « à trier » ? Avec le départ imminent, je n’avais plus vraiment le choix. Les cartons devaient élire domicile dans la famille, dans un espace limité. Une contrainte qui a pesé durement.
- L’argument du « besoin futur » très hypothétique, qui dans mon cas concerne surtout les habits. Cette fois-ci, j’ai soumis chaque vêtement à 2 questions : — Pourquoi devrais-je le garder ? (« C’est mon pull préféré », « Il est tout neuf »…) — Pendant mon voyage (sans durée prédéfinie), ce vêtement sera-t-il plus utile à une autre personne ? C’est ainsi que plusieurs habits d’hiver ont pris la direction d’Emmaüs.
- La dimension émotionnelle et esthétique. Il y a peu de chances que je me sépare de ma collection de pièces et billets commencée à l’âge de 8 ans. J’ai décidé de la garder, car à la question « Aurai-je plaisir à retrouver cet objet quand je déballerai mes affaires dans X temps ? », j’ai répondu oui, sans hésiter. Et je me suis séparée aisément d’autres objets, notamment des « souvenirs » qui « faisaient partie du décor » depuis trop longtemps.
« Me séparer de », « abandonner », « me défaire de »… Indéniablement, ces petites possessions ont quelque chose de rassurant puisqu’elles participent à créer notre territoire. Après plus d’un an de voyage, j’ai appris à construire mon espace sans autant d’objets, une dynamique à conserver lors d’un retour à la sédentarité.