Quand on a des enfants, voyager léger relève du casse-tête : comment prendre peu d’affaires, gérer les questions pratiques et émotionnelles, maîtriser l’impact carbone du trajet ?
epuis quinze ans, ma vie est faite de voyages. Petits ou grands, proches ou lointains, pour assouvir une soif de liberté, une envie d’ailleurs, un besoin d’instabilité parfois. Qu’ils aient été justifiables ou justifiés, qu’ils soient nés d’un caprice ou d’une nécessité, qu’ils aient été mémorables ou qu’ils aient laissé un goût amer, ils ont participé à faire de moi qui je suis et la maman que je m’efforce d’être.
Aujourd’hui, les voyages sont juste moins nombreux, moins solitaires, plus utilitaires. Mais ils restent des parenthèses qui occupent mon esprit longtemps, avant et après leur réalisation. Depuis que j’ai des enfants et que j’essaie de faire mieux avec moins, ils ont pris une dimension presque militaire. Le Tétris des valises, la planification d’un séjour cohérent avec nos habitudes, l’anticipation de quatre semaines sans école, sans nounou, avec (beaucoup) de boulot virtuel et maintenant dans un contexte de pandémie.
VALISES DE PLUS EN PLUS PETITES
Près de deux jours de voyage pour rejoindre notre destination, cela a été toute une organisation. Préparer les en-cas zéro déchets, prévoir les accidents de bébé (je vous passe les détails), booker les trajets les moins polluants et les plus économiques, rechercher un logement clé en main, sécurisé pour les enfants, équipé pour laver les couches, cuisiner sur place, travailler sereinement etc. On y est arrivé, au prix de quelques nuits blanches et de listes de listes.
J’ai par le passé dépensé un quart de mon budget en excédents bagages, voyagé courbée sous des kilos inutiles, abandonné sur la route des achats que j’avais crû indispensables au voyageur (un aspivenin, une perche à selfie, une troisième paire de chaussures…). Avec les années, mes valises se sont faites de plus en plus petites, et de moins en moins nombreuses.
VOYAGER LÉGER MAIS SAVOIR CONCÉDER
Cette fois-ci nous n’avons pas atteint la perfection mais on n’était pas loin : une valise pour quatre, un porte-bébé et deux sacs à dos. Mensonge : j’oublie la valise à roulettes pour enfant modèle coccinelle, absolument inutile mais sans négociation possible pour petite Hirondelle. Être maman c’est aussi concéder. Finalement ça m’a fait un joli repose-pied.
Bref, en faisant l’impasse sur nos trente-six heures de trajet, les retards de transport, les hurlements de fatigue, les tentatives d’escalade et de fugue endiablées de petit Tourbillon, les crises pour un paquet de chips au distributeur et l’éclatement des pneus du bus, le voyage a été léger.
LE GOÛT DES AUTRES
Partir en voyage est un challenge de nos jours, notamment quand on ne va pas se dorer les orteils sous le soleil de Cancún ou chevaucher librement dans les plaines de Basse-Californie (ce qui, soit dit en passant, ne m’aurait pas déplu). Partir c’est pour nous revoir ces personnes que nous aimons et qui nous manquent depuis notre retour en France.
Partir pour resserrer les liens nécessaires qui unissent nos enfants au Mexique, leur autre terre d’origine. Mais on ne va pas se mentir, c’est aussi partir faire le plein de tortillas au maïs façonnées à la main, de papayes et de mangues non importées, de café épicé récolté dans les montagnes d’à côté, de rires ponctués de cris joyeux et d’embrassades interdites. Pour cela, oui, nous sommes montés dans un avion et avons explosé notre bilan carbone de l’année. Alors j’ai pris une bonne résolution : quand je serai présidente, je construirai un tunnel sous l’océan Atlantique pour relier les deux continents et nos deux vies.