Squat story #05 : Le festival des squats consacre Paris comme capitale des lieux alternatifs

Comment et pourquoi Paris est-elle devenue, en quinze ans, la capitale européenne des squats d’artistes ? Grâce aussi au soutien municipal, de Delanoë à Hidalgo. Au printemps 2017, un festival parisien a réuni des squatteurs du monde entier.

Gaspard Delanoe
La dernière visite de Bertrand Delanoë au 59 rue de Rivoli, en 2014, où la clé lui fut symboliquement remise.

Paris, 27 avril 2017. En ouvrant leur journal, Le Parisien, à la page deux, les habitants des quartiers de Ménilmontant, de Belleville, des Buttes-Chaumont ou de Stalingrad, et plus généralement tous ceux qui résident à Paris intra-muros découvrent un peu étonnés qu’une pleine page est consacrée à l’ouverture du festival des squats, le Fou (Festival des ouvertures utiles). Certes, ce festival existe depuis une dizaine d’années mais il n’avait pas, jusqu’ici, été aussi couvert médiatiquement. Il faut dire que le phénomène est en expansion : jamais il n’y a eu autant de lieux alternatifs et squats fédérés autour d’un même festival. Jamais les différentes chapelles de cette sub-culture urbaine n’ont été aussi déterminées à exister, c’est-à-dire à revendiquer haut et fort leur droit à l’expression et leur volonté de se perpétuer.

JAMAIS LA VIE DE BOHÈME N’A EU AUTANT DE LÉGITIMITÉ

En quinze ans, dans le sillage du sauvetage du squat Rivoli, des centaines de lieux ont ouvert, parfois expulsés très vite par les autorités mais, de plus en plus, reconnus, c’est-à-dire considérés comme étant membres à part entière du mouvement urbain, de cette mixité sociale qui ne veut pas disparaître, de cette volonté acharnée de vivre dans Paris, malgré le peu de moyens qui les caractérisent et les poussent, par nécessité, à squatter, c’est-à-dire à s’emparer illégalement de leurs propres moyens de subsistance.

Venant d’Italie, de Roumanie, du Japon, des centaines d’artistes convergent vers Paris et viennent s’installer dans ces lieux précaires, rejouant la vie de bohème du Bateau Lavoir ou de la Ruche de Montparnasse, un siècle plus tôt. Jamais des vies illégales n’ont eu autant de légitimité dans la ville-lumière.

Crédit photo : Valéria R
Devant le squat La Petite Maison, dans le 11e arrondissement de Paris pendant le Fou, festival des ouvertures utiles. Crédit photo : Valéria R.
Crédit Photo : Valeria R.
A l’intérieur du squat La Petite Maison pendant le Fou, en avril dernier. La devise du lieu: « Squatter, c’est exercer son droit de désobéissance face aux dysfonctionnements du système. » Crédit photo: Valérie R.

A l’Hôtel de Ville, la passation s’est faite en douceur. Malgré une immense vague conservatrice de droite, observée dans tout le pays aux municipales de 2014, Bertrand Delanoë a réussi à passer le flambeau à Anne Hidlago. Paris est resté à gauche.

Dans son programme, rien n’indique d’ailleurs qu’Anne Hidalgo ait une volonté d’infléchir ou de changer le volet de la politique culturelle consacré aux collectifs d’artistes. Au contraire, elle s’en revendique et affirme qu’elle poursuivra ce que Delanoë a commencé.

Au soir de son élection, dans son bureau qui surplombe la Seine, Anne Hidalgo regarde le fleuve descendre sous ses fenêtres et suivre son éternel cours.

Est-ce le même fleuve ?
Ou jamais le même ?
Le temps passe.
L’air de rien, Paris est devenue la capitale européenne des squats d’artistes.

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À propos de l'auteur
Le mot performeur me semble le plus adéquat pour décrire mes différentes activités : colporteur de journaux, comédien, ouvreur de squats artistiques, chroniqueur au Huffington Post, candidat à diverses élections… J’ai publié mon premier récit, « Autoportrait (remake) », en 2017 aux éditions Plein Jour.
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